Actualité - 13 février 2020
Parole de Directeurs >>> Valérie Tesnière
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Parole de Directeurs >>> Valérie Tesnière
Vous avez accompagné la transformation des CADIST en CollEx-Persée. Comment analysez-vous le chemin parcouru jusqu’à aujourd’hui ?
La mission des CADIST centrée sur l’acquisition de la production éditoriale académique de niveau recherche par discipline, était remise en cause dans le contexte des licences nationales de documentation électronique. De surcroît les CADIST ne travaillaient pas ensemble ou marginalement. Quant aux relations avec les chercheurs, elles étaient variables d’une bibliothèque à l’autre. Les nouveaux usages induits par le développement des ressources en ligne les bousculaient. De nombreux chercheurs négligeaient le potentiel des collections spécialisées, dont l’usage tendait à se réduire à quelques lecteurs réguliers.
Une des premières urgences a été de remettre la prise en compte de la demande et des usages nouveaux de la recherche au cœur du dispositif. L’autre a été de rappeler l’importance des collections d’excellence et de définir un périmètre d’action pour accroitre la visibilité de ces ressources. Ce travail réflexif a fait mieux ressortir la variété des supports documentaires, le caractère original des fonds condition d’une labellisation CollEx, l’intérêt de collectes auprès des producteurs, enfin et surtout les services pour la recherche associés aux collections.
En peu de temps, les bibliothèques CollEx se sont approprié ces enjeux. L’appel à projets a été un bon levier, sans devenir un guichet complémentaire des dispositifs ANR destinés à la recherche. Il y avait un risque de morcellement, qui a été plutôt évité, tout le monde finissant par s’accorder sur des critères de partage d’expériences, de modélisation ou d’utilité pour d’autres membres de ce qui est devenu un réseau documentaire de et pour la recherche. C’est l’évolution marquante du 2ème appel à projets.
Comment La contemporaine a-t-elle mis en œuvre le dispositif ?
La contemporaine, qui est à la fois une bibliothèque, un centre d’archives privées et un musée relevant de l’Enseignement supérieur, est bibliothèque délégataire dans la thématique Mondes contemporains. Elle était déjà engagée sur des terrains, que privilégie le réseau, par exemple l’archivage pérenne des fonds numérisés et numériques natifs ( partenariat avec le CNRS et HumaNum) ou la co-construction de programmes de recherche avec les enseignants-chercheurs avec le Labex PASP, qui associe aussi la BnF et les AN (dissémination sur le Web du patrimoine numérisé de la Grande Guerre, constitution d’archives orales…).
Pour être en phase avec les besoins des chercheurs d’aujourd’hui, il lui faut déterminer la collecte des matériaux documentaires les plus utiles à l’ère numérique, sans oublier ceux qui sont susceptibles de disparaître avec les producteurs eux-mêmes au fil des ans. La dynamique de CollEx a donné une impulsion et une visibilité à ces enjeux et permet de les partager avec d’autres bibliothèques détentrices de fonds d’excellence.
Nous avons choisi de privilégier des projets « réseau » qui associent les chercheurs mais aussi le GED Condorcet, l’IHEAL, la Bulac et de nous centrer sur l’amélioration de la visibilité de fonds méconnus, faute de référencement approprié, ainsi que sur la sensibilisation des chercheurs à la sauvegarde de nouvelles ressources documentaires grâce à l’appui des bibliothèques CollEx (collecte, signalement, préservation, formation). Le réseau CollEx a structuré la refonte de notre charte documentaire 2020 et nous a conduits à préciser des notions comme celle de matériaux documentaires de la recherche. Les collections de La contemporaine sont en outre très pluridisciplinaires, ce qui correspond à la recherche SHS d’aujourd’hui. Dans les projets mis en œuvre avec les chercheurs, par exemple dans le champ des archives orales, se croisent des pratiques différentes des sociologues, des anthropologues et des historiens en matière de production, préservation et – plus nouveau- mise à disposition élargie, problématique peu développée chez les chercheurs. L’apport des bibliothèques de recherche est patent en termes d’harmonisation et de diffusion des bonnes pratiques.
Quelles seraient vos attentes pour la suite de la durée du GIS ? Et au-delà ?
La feuille de route de CollEx a inscrit dans ses objectifs, une cartographie des fonds et des équipes de recherche. Est-ce d’une cartographie dont nous avons besoin ? Ou simplement d’une meilleure visibilité des fonds utiles à la recherche qui recourt aux outils de l’Abes et du CCFr, aux pratiques wiki et aux techniques d’amélioration du référencement par les moteurs de recherche ? Il ne faut pas penser un outil mais sa finalité : faire dépasser le rayonnement d’une collection spécialisée au-delà du cercle des habitués ou des usagers avertis. Il y a un peu de travail pour les bibliothèques, soutenues par les opérateurs. Mais l’enjeu en vaut la chandelle, parce qu’il renforce le réseau tout en ayant un résultat concret pour les chercheurs. Ce chantier de la cartographie est le socle qui fonde un travail commun étroitement lié aux besoins des chercheurs. Son issue conditionne le fonctionnement ultérieur du réseau CollEx. A partir de là, nous serons dans une dynamique forte avec les équipes de recherche, qui a vocation à perdurer.
Valérie Tesnière
Directrice de la Contemporaine
http://www.lacontemporaine.fr/
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