Actualité - 1 juillet 2020

#BilanDeProjet : Antiquarium du musée Adolf Michaelis

Ensemble de céramiques troyennes de l’Age du Bronze | © Marion Bouteloup
Antiquarium du musée Adolf Michaelis à Strasbourg - Etude pour la numérisation de la céramique antique - est un des projets boursier lauréats de l’appel à projets CollEx-Persée 2018-2019. Voici son bilan.

La bourse numérisation accordée par CollEx-Persée avait pour objectif la formation du porteur scientifique d’un projet de Perséide autour du fonds Michaelis, porté par l’université de Strasbourg et accueilli au sein de l’UMR 7044-Archimède. Cela s’est concrétisé par la réalisation de plusieurs stages en immersion dans des institutions qui ont favorablement accueilli le projet de numérisation de la céramique antique de la collection Michaelis. Ces différents partenaires m’ont ainsi apporté leur expertise scientifique et technique, essentielle pour cerner les enjeux de la dématérialisation d’un corpus aussi important d’objets. Qu’ils soient ici chaleureusement remerciés pour leur accueil et leur implication dans le projet.

Un premier stage en immersion a été organisé au laboratoire de l’UMS Persée à Lyon en juillet 2019, sous la direction d’Hélène Begnis. L’objectif était à la fois de présenter le projet de numérisation à l’équipe de Persée afin de bénéficier de leur expertise mais également d’acquérir de nouvelles compétences dans le montage de projets numériques et comprendre les exigences requises pour la création d’une Perséide. J’ai ainsi eu l’opportunité, en tant que porteur scientifique du projet, de passer plusieurs jours dans le laboratoire et de travailler en collaboration avec les différents pôles de Persée afin d’appréhender le fonctionnement général des Perséides.

Les membres de l’équipe Persée m’ont donc expliqué les différentes étapes de la création d’une Perséide. Le résultat final attendu est une image du portail Persée appliquée à un corpus spécifique, ce qui implique de respecter un certain nombre d’exigences dans le montage de notre projet autour de Michaelis.

On a immédiatement attiré mon attention sur le fait que pour pouvoir faire l’objet d’une Perséide, le corpus à numériser doit être libre de droits. Cette question des droits d’auteurs soulevée pendant le stage est aujourd’hui partiellement réglée, puisque les objets qui vont être numérisés sont la propriété de l’université de Strasbourg. Ces pièces antiques ne posent pas de problèmes de droits d’auteurs et les images pourront être diffusées sous licence libre ETALAB ou Creative Commons. Une dématérialisation de ce corpus semble donc envisageable. Cependant, le projet de Perséide autour du fonds Michaelis entend faire le lien entre les notices des objets et les documents d’archives qui ont permis leur enrichissement. L’exploitation de ces fonds d’archives nécessite donc un travail préparatoire important : la recherche des ayants droits d’Adolf Michaelis est en cours, afin d’obtenir les autorisations de diffusion des fonds d’archives conservés à Strasbourg.

L’un des points essentiels abordé au cours du stage a été celui de la structuration du corpus lui-même et de la définition des orientations scientifiques et méthodologiques de la future Perséide autour du fonds Michaelis. La première étape consiste à déterminer la volumétrie totale du corpus pour ensuite réfléchir à la manière dont nous souhaitons le diffuser, avant de sélectionner les éléments qui seront pertinents à traiter. Etablir des priorités est indispensable à la réussite du projet puisqu’il faut également réfléchir au traitement de chaque type de document en fonction de leur usage. Après avoir effectué ces constats au cours du stage, plusieurs initiatives de documentation de la collection se sont développées afin de répondre à la question de la volumétrie du corpus. D’une part, le catalogage de l’ensemble des tirages en plâtre du musée Michaelis est en cours sur une base de données informatisées. D’autre part, une opération de catalogage des archives Michaelis est en cours à la BNU de Strasbourg et permettra à terme de définir précisément le contenu des fonds et d’en extraire les documents qui paraitront les plus pertinents à inclure dans le corpus final de la Perséide. Pour ce qui concerne la céramique antique, la décision a été rapidement prise d’opérer une sélection au sein du corpus. Réduire le nombre d’objets semble pertinent afin de permettre leur exploitation plus approfondie au sein du futur projet de Perséide. Ce travail de sélection a été mené en étroite collaboration avec nos interlocuteurs au musée du Louvre.

Lors de mon immersion au sein du pôle production du laboratoire, ce sont principalement les contraintes techniques d’intégration au portail Persée qui m’ont été présentées. Comprendre l’ensemble de ces exigences m’a permis d’insister auprès de nos différents partenaires sur la nécessité de les appliquer dès les prémisses du projet, afin de gagner en efficacité sur le long terme. La campagne photographique des objets sera donc réalisée en tenant compte des exigences techniques pour la diffusion des images, qui doivent être conformes en termes de résolution et de format (uniquement des images TIF, 400 DPI). De plus, le portail Persée est prévu pour exploiter des documents en deux dimensions. A l’heure actuelle, il n’est donc pas envisageable techniquement de proposer des restitutions en trois dimensions des objets.  Les documents d’archives risquent également de poser des problèmes d’intégration dans le portail Persée, puisqu’il n’est techniquement pas possible de faire de l’OCR pour l’écriture manuscrite. Cela signifie qu’il sera impossible de proposer de la recherche en texte intégral dans les documents d’archives, sauf si une transcription préalable est réalisée afin de transformer les documents manuscrits en documents imprimés. Pour ce qui est des documents d’archives qui nous informent sur les céramiques antiques, il serait éventuellement possible de transcrire uniquement les documents essentiels, afin d’enrichir les possibilités de navigation à l’intérieur du corpus qui sera diffusé. Une photographie du document manuscrit original pourrait alors être proposée en complément de sa transcription imprimée.

Une Perséide, en permettant un point d’accès unique à un corpus, représente une opportunité majeure de valoriser la collection Michaelis et de la rendre accessible à tous, et particulièrement aux chercheurs. Il est donc nécessaire de développer des outils spécifiques pour explorer la Perséide et exploiter au mieux les données du corpus. Au cours du stage, la question des outils nécessaires au fonctionnement d’une Perséide autour du fonds Michaelis a été abordée et des premières pistes de travail ont émergé. Une fois le corpus à diffuser bien identifié, il faut créer un référentiel, un ensemble de notices qui vont décrire les objets. L’objectif majeur est de créer un référentiel adapté à notre corpus tout en s’appuyant sur les référentiels déjà existants. Il s’agira donc de transformer la base de données des céramiques créée sur FileMaker dans le cadre de ma thèse de doctorat, en un référentiel interopérable qui doit être conforme aux standards du web de données. Pour la partie éditoriale de la Perséide, il s’agira de réfléchir à une page d’accueil, à la création d’un moteur de recherche et à la structuration d’un index. Enfin, de la numérisation à la diffusion en ligne, le traitement documentaire doit être adapté puisqu’il détermine l’affichage et les fonctions de navigation sur le site internet. Il s’agira donc de sélectionner les données essentielles qui doivent être rendues accessibles et de définir le format le plus adapté à leur exploitation en ligne. De plus, les protocoles appliqués par le pôle documentation de Persée permettent de récolter des métadonnées sur d’autres sites, ce qui constitue une opportunité d’enrichissement importante pour une future Perséide. Cette démarche permettrait par exemple de récolter toutes les informations relatives à Adolf Michaelis sur d’autres plateformes en ligne.  L’un des objectifs majeurs du projet, celui de dématérialiser la démarche de recherche du chercheur, serait alors rempli puisqu’il serait possible de passer d’une information à une autre en naviguant sur différents sites.

Enfin, ce stage en immersion a été l’occasion pour moi de présenter la base de données des céramiques créée sur FileMaker ainsi que le catalogue des tirages en plâtre développé sur Collective Access. Les informations de la base créée sur FileMaker pourraient être exportées depuis des fichiers Excel vers la base Collective Access car les données sont interopérables. A terme, il serait donc possible de faire des liens entre les notices de la future Perséide et celles de la base Collective Access. L’enjeu sera alors de repenser l’articulation entre les différentes parties de la collection et déterminer quelles sont les données qui doivent être rendues publiques et lesquelles doivent rester privées. 

A l’issue de ce stage au laboratoire Persée, ce sont toutes les problématiques techniques liées au développement d’une Perséide, celles de la nécessaire sélection à opérer au sein du corpus ainsi que celles de l’interopérabilité des données qui ont été abordées au cours d’échanges fructueux. De nombreuses interrogations concernant la suite du projet ont ainsi pu être levées et ont permis de définir plus précisément la méthodologie qui doit être mise en œuvre ainsi que les orientations à donner au travail scientifique à effectuer autour des objets. Une restitution des résultats de ce stage a ensuite été faite aux différents membres de l’équipe scientifique du projet à Strasbourg.

A la suite de ce premier stage, un second séjour a été planifié à Paris en octobre 2019, afin de bénéficier de l’expertise scientifique et technique du département des Antiquités grecques, étrusques et romaines du musée du Louvre sur la création et la gestion d’une base de données regroupant des céramiques antiques. Ce séjour m’a permis de définir les orientations à donner à mon travail afin de faire de ma base de données un instrument scientifique qui pourra être exploité en ligne. La problématique majeure à laquelle je suis confrontée est celle de la production de métadonnées et de données numériques spécifiques à mon corpus, qui doivent cependant s’inscrire dans les référentiels existants.

Au cours de ce stage, j’ai été en mesure d’étudier les référentiels utilisés par les équipes du musée du Louvre pour la description des pièces à numériser. Les différents champs de la base de données créée dans le cadre de ma thèse de doctorat ont donc  été alignés sur ceux utilisés par le musée du Louvre sur la base Atlas. Dans le cadre d’une Perséide, il s’agira de développer une fonctionnalité qui permettra de faciliter la navigation entre les différentes fiches décrivant les objets. Cela implique de créer dans la base de données de la thèse des liens entre certains vases, en fonction de différents critères qui ont été définis : la date de création, le nom de l’artisan, le lieu de découverte, le nom de l’acheteur ou du donateur.   

Le musée du Louvre a également été un partenaire essentiel pour définir le corpus d’objets qui sera proposé à la dématérialisation dans le cadre du projet de Perséide. Le choix a donc été fait de sélectionner parmi les 500 vases et tessons de la collection, ceux qui présentent un intérêt scientifique majeur. Ont ainsi été retenus en priorité les vases provenant du site de Troie qui est à l’heure actuelle l’ensemble le mieux documenté au sein de la collection et qui comporte une quarantaine de numéros. Les vases qui ont été identifiés et datés par Sir John Beazley ont également été sélectionnés, puisqu’ils ont déjà fait l’objet d’une première publication en ligne sur la Beazley Archive, qui pourra servir de point d’appui au sein du projet de Perséide. Cela correspond à une vingtaine de vases et tessons.

En parallèle, la consultation des bases de données de l’Institut national d’histoire de l’art a permis de faire émerger de nouvelles possibilités éditoriales pour le projet de Perséide. Il serait envisageable de proposer une navigation dans les fiches d’inventaire à partir d’une carte présentant les coordonnées GPS des lieux de découverte des objets. La création d’une telle fonctionnalité  nécessiterait la création d’un référentiel géographique répertoriant chacun des lieux de découverte, tout en incluant des correspondances entre les noms des lieux dans l’Antiquité et les noms actuels de ces mêmes endroits.

A l’issue de ces deux stages, le travail scientifique sur le corpus de céramique antique s’est poursuivi et un bilan intermédiaire de la thèse de doctorat a été présenté en juin 2020 à Daniela Lefèvre Novaro directrice de la thèse au sein de l’UMR 7044-Archimède ainsi qu’à Anne Coulié, spécialiste de la céramique grecque et conservatrice au département des Antiquités grecques, étrusques et romaines du musée du Louvre. Les fiches d’inventaire d’une partie des objets sont achevées et ont été validées et le travail sur la base de données se poursuit, afin de préparer la future dématérialisation du corpus et sa mise en ligne.

Un atelier rassemblant les différents acteurs du projet, organisé au sein de l’UMR 7044-Archimède, était  prévu à Strasbourg pour le mois de mai 2020. Cet atelier avait pour objectif de dresser un bilan des différentes actions menées dans le cadre de la bourse de numérisation et d’en présenter les résultats à l’équipe du laboratoire.  Il devait permettre de développer de nouvelles orientations et perspectives de travail pour favoriser la valorisation de la collection Michaelis. Cependant, cet atelier a du être annulé en raison de l’épidémie de coronavirus. Les échanges avec les différents partenaires du projet tels que le musée du Louvre et la BNU de Strasbourg se sont donc poursuivis par le biais d’échanges de mails.

Grâce au travail mené dans le cadre de la bourse de numérisation CollEx-Persée et à l’avancée de la thèse consacrée à la collection, la connaissance scientifique des objets a fortement progressé et plusieurs projets concrets de valorisation ont récemment vu le jour.

Un échantillon de la collection de céramiques du musée Michaelis a fait l’objet d’une première présentation au public à la BNU de Strasbourg lors de la Nuit des Musées 2019. Grâce à la collaboration de Vincent Blanchard, conservateur des collections d’Anatolie et de l’Antiquité tardive au département des Antiquités orientales du musée du Louvre, les vases troyens de la collection strasbourgeoise ont accompagné sa conférence consacrée à la ville de Troie.

Une dizaine de vases de la collection ont également été sélectionnés pour être exposés au printemps 2021 dans le cadre d’une exposition organisée à la Misha de Strasbourg intitulée « A l’aube de l’archéologie grecque », dont le commissariat est assuré par Daniela Lefèvre-Novaro. Cette exposition aura pour but de célébrer le bicentenaire du début de la guerre d’indépendance du peuple grec contre l’empire ottoman. Destinée à valoriser le patrimoine scientifique de l’Université de Strasbourg, cette exposition réunira des témoignages essentiels permettant de comprendre les débuts de l’archéologie au XIXe siècle. Les vases de la collection Michaelis y ont donc toute leur place, en tant qu’objets originaux issus des fouilles du XIXe siècle mais également en tant que témoins des méthodes employées pour constituer les collections universitaires durant cette période.

Ces premières présentations physiques de la collection au public sont l’occasion de réfléchir à des solutions muséographiques et scénographiques reposant sur des outils numériques, qui pourraient améliorer l’expérience du visiteur. Dans le cas des tessons qui seront présentés à la Misha de Strasbourg en 2021, la question d’une numérisation en trois dimensions des objets, permettant au visiteur de les observer à 360 degrés sur une tablette tactile, a été envisagée mais reste encore trop coûteuse pour être mise en œuvre dans l’immédiat.

Marion Bouteloup

Doctorante UMR 7044-Archimède Université de Strasbourg

#BilanDeProjet

 

Voir ce bilan au format .pdf > ici 

Voir la page projet dédiée > ici

Voir la page de tous les projets > ici

Une actualité ou un événement à partager avec nous ?

Proposez vos actualités et événements afin qu'ils soient publiés sur le site du CollEx-Persée